samedi 21 janvier 2017

Au revoir là-haut

Couverture Au revoir là-hautTitre : Au revoir là-haut
Auteur : Pierre Lemaître
Editeur : Albin Michel



Dans les tranchées, à la fin de la première guerre mondiale, trois hommes se côtoient. Il y a un officier et deux soldats ; un salaud, un gentil et un artiste ; un noble, un fils de riche et un homme du peuple ; un homme qui a profité de la guerre pour avancer socialement et deux qui ont tout perdu. Mais après la démobilisation, les trois hommes ont la même idée : profiter des opportunités de l'après-guerre pour devenir riches, enfin.


Voici une lecture complètement inattendue. Prêté par une de mes connaissances, je me suis dit que ce serait une bonne idée de changer un peu de registre.  La couverture, austère et la précision sur le fait qu'il s'agissait d'un gagnant du prix Goncourt aurait pu me dissuader. Et pourtant je me suis lancée dans l'aventure. 
Parlant d'une époque méconnue, la fin de la première guerre mondiale, ce roman nous fait réfléchir à la manière dont la France a traité ses soldats rescapés. Mutilés par une guerre sans merci, traumatisés, ils reviennent, une fois démobilisés, dans une société qui a évolué sans eux. Ils n'ont plus de places, des pensions de guerre ridicules et sont traités sans ménagement par les civils qui, ne comprenant pas l'enfer des tranchées, se plaignent de leur conditions de vie à l'arrière, certes difficiles mais incomparables à la vie sur le front. Les possibilités de réinsertion sont quasi inexistantes et les traumatismes, causés par la guerre, incompris et moqués. Quelle possibilités restent'ils à ces soldats si ce n'est la marginalisation?
Edouard et Albert sont l'exemple type de ces soldats malmenés. L'un est une gueule cassée, complètement défiguré, artiste de génie, devenu muet à la suite d'une blessure par obus qui lui a arrachée la moitié du visage. L'autre, Albert, se sentant responsable de son compagnon qui lui a sauvé la vie, se met en quatre pour assurer leur existence et survit à coup de petits boulots. En parallèle de ces deux soldats nous suivons l'ascension sociale fulgurante d'un ancien capitaine, Pradelle. Celui ci, sans remord ni conscience envoie des dizaines d'hommes à la mort pour un petit moment de gloire, belle image d'un officier à la veille de l’armistice...
Ainsi à travers ses trois personnages, Edouard le noble, Albert l'homme du peuple et Pradelle, le bourgeois, l'auteur nous dresse un portrait au vitriol de la société française de l'après guerre qui finalement n'a pas vraiment changé. La force de ce roman est de nous faire revivre cette époque : le langage tantôt familier tantôt soutenu, suivant quel personnage a la parole, nous entraîne plus profondément dans le quotidien de chacun. Les personnages secondaires sont fabuleux, de Merlin, le contrôleur incorruptible à Louise, la petite fille qui aide les deux soldats au père d'Edouard, bourré de remords. Tous sont finalement très bien construits et donnent un intérêt certain au roman.
Impossible de ne pas frémir devant l'absence de reconnaissance d'une nation pour ses soldats qui, parce qu’ils ont survécu, ne sont pas des héros. La glorification des morts au détriment des vivants est très bien traitée et questionne : faut il mourir en martyrs pour exister ?

J'ai trouvé dommage le résumé du livre qui finalement dévoile l'intrigue de la seconde partie du roman, faisant abstraction de la première qui est tout aussi importante. J'ai volontairement mis un autre résumé pour éviter un spoil vraiment dommageable.

Le roman a été adapté en BD en 2015 et devrait sortir au cinéma cette année, voilà une autre manière de le découvrir pour ceux qui ne souhaitent pas se lancer dans cette lecture.

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4 commentaires:

  1. Quelle belle chronique ! Tu me donnes envie de découvrir ce roman qui ne m'aurait pas du tout attirée, en principe. :-)

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    1. Merci ! Je t'avoue que je ne l'ai lu que parce qu' on me la prêté...mais je ne le regrette pas du tout.

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  2. Ce n'est pas du tout une période de l'histoire sur laquelle j'aime lire des livres, donc je passe mon tour, mais je suis contente que tu aies apprécié ta lecture! :)

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    1. Cette lecture est vraiment un hasard de rencontres. Je ne lis en général pas ce type de romans, mais je ne suis clairement pas déçue.

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